• En l’an 1337, Charles de Blois, comte de Chatillon et neveu du roi de France Philippe VI épouse Jeanne de Penthièvre, nièce de Jean III, duc de Bretagne. Le mariage est célébré à Rennes où un grand tournoi est organisé à cette occasion.

    En sa qualité de chevalier breton, Robert du Guesclin a été convié à prendre part aux joutes. Son fils le suit, juché sur un cheval de labour dont on n’eut pas donné 4 florins.

    Il y a là nobles familles de Bretagne et d’ailleurs. Ah ! qu’il ferait bon participer à cette liesse ! Mais à quoi bon contempler la gloire des autres ? Désabusé, Bertrand quitte la place et se dirige mélancoliquement vers son hôtel où il voit entrer un sien cousin. Il le suit jusque dans sa chambre et s’agenouille devant lui.

    ­– Ah, cousin, implore-t-il, prêtez-moi votre harnais et votre cheval, s’il vous plaît. Si le faites je jure Dieu que vous aurez récompense de m’avoir aidé aujourd’hui.

    – Vous vous êtes bien adressé, réplique le jeune homme touché par la flamme qui brûle dans les yeux de Bertrand. Je vais vous armer un continent et vous prêter mon valet pour vous aider.

    En un tour de main, Bertrand est armé de pied en cap. Le visage dissimulé par un heaume, il enfourche le cheval de son cousin et, précédé du valet, se dirige vers la place du marché.

    Parvenu dans la lice, ayant recommandé son âme à Dieu, il lance défi à quiconque acceptera de le relever. Ils sont tous là, les Beaumanoir, les Tinténiac, les Rochefort, les Clisson, les Rohan, les Raguenel, les Chateaubriand, les princes de France, à observer cet inconnu qui ose les braver.

    Il est inconnu, en effet, car aucun signe distinctif ne vient indiquer sa naissance ni son rang, afin de n’être pas reconnu par son père.

    Un chevalier se présente. Bertrand s’élance et atteint son adversaire au milieu de la visière, lui arrachant le heaume de la tête. Sous la violence du choc, le cheval est tué : quant au cavalier, il demeure évanoui un moment. Quand, revenu de son inconscience, il s’enquiert du nom de son vainqueur, nul ne peut lui répondre, Bertrand conservant sa visière baissée.

    – Sire, dit un valet, vous ne le saurez que s’il est déheaumé par vous ou par quelque autre.

    Mais déjà, les jeux ont repris. Plusieurs chevaliers, qui voulaient faire voler le heaume de Bertrand sont tour à tour déboutés.

    La curiosité de Robert du Guesclin est à son comble. Quel est donc cet inconnu ? Sûr de son expérience et de sa force, il se présente dans la lice, pique des deux. A son tour, Bertrand éperonne sa monture et s’élance, mais, reconnaissant les armoiries de son père, il abaisse sa lance, fait un écart, et regagne sa place, refusant le combat.

    La foule, qui s’enthousiasme vite, se détourne aussi vite de ceux qui la déçoivent. Leur héros ne serait-il donc qu’un pleutre ?

    Un nouveau champion se présente. Mal lui en prend. Bertrand s’avance hardiment et arrache son heaume de la pointe de sa lance.

    Les ovations reprennent.

    Au total, ils sont une quinzaine à se faire décoiffer par Bertrand ou à voir leurs lances rompues. Finalement, un chevalier normand, renommé pour son adresse, parvient à déheaumer le jeune breton. Stupéfaite, l’assistance ayant reconnue Bertrand, l’enthousiasme se mue en délire.

    Robert du Guesclin s’approche de son fils, qui n’a alors que 17 ans, pour lui donner l’accolade.

    Bon fils, dit-il, je vous assure que je ne vous traiterai plus vilainement, comme je l’ai fait jusqu’alors, puisqu’aujourd’hui, vous m’avez fait honneur.

    Dorénavant, le nom de Bertrand court de bouche en bouche, déborde bien vite de la place du marché pour s’étendre sur toute la Bretagne.


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  • Le tombeau qui contenait ses entrailles (église Saint-Laurent, au Puy échappa à la profanation : l'urne fut mise en dépôt à la mairie en vue de lui donner une sépulture laïque puis fut finalement replacée dans l'église Saint-Laurent avec son contenu, ils y demeurent toujours.

    Eustache Deschamps composa une Ballade sur le trépas de Bertrand du Guesclin.

                                                     

                                                                                         

                           Dédicace Bertrand du Guesclin                      

             dans l'église de Saint Laurent du Puy en Velay

       Les entrailles sont prélevées et enterrées dans l'église des Jacobins, aujourd'hui St Laurent. C'est là son premier tombeau. On peut le voir en gisant, les mains jointes, couvert de son armure, moins le casque qu'on ne donnait qu'aux guerriers tombés sur le champ de bataille, avec cette épitaphe :
       "Ci-gist honorable et vaillant messire Bertrand CLAIKIN, comte de Longueville, jadis connétable de France qui trépassa l'an MCCCLXXX, le XIIIème jour de juillet".

       Les consuls du Puy le régalèrent d'un service magnifique dans lequel 25O torches brûlèrent durant toute la cérémonie. La bière était couverte d'un drap d'or bordé de noir et brodé de ses armes. Un maître en théologie du collège prononça son oraison funèbre.


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  • Le roi Charles V prît la décision de faire enterrer les ossements de son défunt connétable dans la basilique royale de Saint-Denis, aux côtés des rois de France.

       Sa sépulture, comme celles de la plupart des princes et dignitaires qui y reposaient, fut profanée par des révolutionnaires en1793, comme le fut aussi le tombeau contenant ses chairs bouillies (à Montferrand).


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  • Jeanne de Malemains est d'une grande beauté, pleine de grâce et de féminité. Or, le rejeton auquel elle vient de donner la vie est d'une rare laideur et ceci l'emplit d'effroi. Ne pouvant le regarder, elle le confie à une nourrice. Lorsqu'il revient au manoir paternel, 5 ans plus tard, sa laideur s'est encore accentuée et sa mère s'en détournera à tout jamais. Son père le prend également en grippe.

    Bertrand, qui espère trouver de l'affection ne rencontre au foyer familial, que froideur et indifférence. Pire, on le place en quarantaine !

    Alors que ses frères puînés, Guillaume et Olivier, partagent leurs repas avec leurs parents, à la table familiale, lui, l'aîné, est relégué dans un coin sombre. Imitant leurs maîtres, les valets le maltraitent, mais il fait front, distribuant, malgré son très jeune âge, coups de pied, de poing, et de tête pour se défendre. Le désert affectif qui l'entoure fait que son tempérament, d'un naturel impétueux, va incliner vers le pire. Il était vif, turbulent, empli d'une force qui couvait déjà, terrible. Altérée par les brimades, la stupidité de son entourage, cette vigueur, qui eut pu être heureusement canalisée, va se métamorphoser en rudesse, en emportement. Il devient de plus en plus irascible.

    Permettez-moi d'emprunter à Yves Jacob le récit détaillé d'une scène de son enfance.

    Un jour de fête, alors qu'il a environ 6 ans, il se révolte. Jeanne de Malemains vient d'ordonner de servir le potage. La table a été préparée avec soin.

    Comme à l'accoutumée, Bertrand dîne à l'écart, dans l'ombre, installé devant une petite table, tandis que ses frères siègent près de leur mère.

    Son époux étant absent, Jeanne de Malemains se doit de présider aux agapes, de distribuer des propos aimables à chacun. Mais elle se sent fiévreuse et a envoyé quérir une converse d'origine juive, réputée pour ses connaissances médicales.

    En attendant sa venue, le repas se poursuit. Après les poissons, le maître d'hôtel fait servir un chapon doré du plus engageant aspect. Bertrand contemple la table richement décorée, sa mère, ses frères, les mets succulents qu'on lui présente en dernier et, soudain, il explose. Bondissant de son coin, il s'élance vers la table, bouscule ses frères et leur lance : Est-ce à vous de manger les premiers ! Rendez-moi ma place. Je suis votre aîné !

    Médusés, Olivier et Guillaume dévisagent Bertrand. Son aspect est terrible : cheveux ébouriffés, vêtements souillés, mains sales, regard glauque, bouillonnant de colère. Mieux vaut obtempérer. Ils se serrent sur le banc. Bertrand s'installe à leurs cotés, puis, sans souci de bienséance, il plonge ses mains dans les plats, enfourne avec gloutonnerie tout se qui est à sa portée. Surprise par la soudaineté de la scène, Jeanne intervient alors :

    – Hors d'ici Bertrand, partez tout de suite, sinon je vous ferai battre !

    L'enfant se dresse d'un jet. Battu, il sait ce que c'est. Son corps en porte les traces quotidiennes. Mais rossé devant les convives, il ne peut l'accepter. Il s'arc-boute alors, secoue la lourde table de chêne, renversant boissons, argenterie et mets délicats. Imaginez la scène : les convives dressés, souillés de sauce et de vin, les chiens se régalant des viandes, les domestiques affairés, les bancs renversés, etc..

    – Mon Dieu, gémit Jeanne de Malemains, au milieu de la consternation générale, que voici un enfant rude et malgracieux ! Plut à Dieu qu'il fût mort ! Je suis la femme au monde la plus malheureuse d'avoir donné le jour à un rustre, un bouvier qui ne peut que déshonorer un jour sa famille !

    A cet instant, la converse du couvent voisin, juive convertie que dame Jeanne a fait quérir pour la soigner, entre dans la pièce. Elle ne peut dissimuler sa surprise en découvrant la maîtresse de maison en larmes, les enfants effarouchés, et Bertrand, recroquevillé dans un coin, au bas bout de la salle, son bâton de houx résolument serré dans les mains, près à en découdre si quelqu'un se hasarde à vouloir le molester. "Que se passe-t-il ?" questionne-t-elle.

    Dame du Guesclin lui relate les faits.

    Pendant ce temps la religieuse observe Bertrand avec curiosité. Puis elle s'avance vers lui en lui tenant des propos si aimables qu'ils viennent vers l'enfant comme une caresse. Jamais on ne lui a parlé avec une si égale douceur. Décontenancé, il écoute un temps la musique des mots, puis il se ressaisit. Il ne faut pas lui en conter. Il y a là sûrement quelque vilaine traîtrise destinée à s'emparer de lui pour le livrer aux valets.

    – Gare, grommelle-t-il, en brandissant son bâton. Laissez-moi tranquille, sinon...!

    – Je vous l'avais dit, s'exclame Jeanne de Malemains, il n'y a pas pire enfant au monde. Il a le sang mauvais et je le voudrais sous terre.

    Comme si elle n'avait pas entendu, la converse continue à parler doucement à Bertrand. La bonté du regard est telle que le bâton s'est abaissé. La religieuse, chacun le sait à la Motte-Broons, possède des talents de devineresse. Elle analyse les traits de l'enfant, prend sa main qu'il lui abandonne, subjugué, en examine les linéaments.

    – Dame, prophétise-t-elle, en se tournant vers la mère de Bertrand, ne soyez pas si courroucée. Je vous jure sur Dieu et mon baptême, que ce fils surpassera en gloire tous ses ancêtres. Il n'aura pas son pareil dans tout le firmament et il sera comblé de tant d'honneurs par le roi de France qu'on parlera de lui jusqu'à Jérusalem.

    – A quoi le savez-vous ? interroge Dame du Guesclin, étonnée ?

    – Je le sais, et s'il n'en était ainsi, je m'offre pleinement à être brûlée vive.

    Entre temps, les valets ont redressé la table et le repas a repris.

    Courtoisement, Jeanne convie la religieuse à prendre place près d'elle. On apporte un paon rôti. Charmé par les propos qu'il vient d'entendre, Bertrand s'approche du paon, et avec sa fougue habituelle arrache le plat des mains du maître d'hôtel; puis, sous le regard adouci de sa mère, il sert lui même la religieuse et lui verse du vin  avec tant d'empressement qu'il en répand la moitié sur la nappe. Troublée par ce geste de considération envers la converse, Jeanne ne se récrie pas. Elle est impressionnée, elle aussi, par la prédiction. Et si tout cela devait être vrai ? Et si cet enfant hideux et mal embouché devait être appelé à une illustre destinée ? Les voies du Seigneur sont si impénétrables...

    Les convives partis, elle mande les domestiques et leur ordonne de traiter désormais Bertrand avec les égards dus au fils aîné de Robert du Guesclin.

    Bertrand ne prise guère l'école. Il ne saura jamais lire, ni écrire autre chose que son nom, dont 4 ou 5 spécimens connus semblent avoir été tracés avec peine.

    Aux bancs de l'école, il préfère les chemins creux. Il organise avec les gamins de son village de véritables batailles rangées. A 9 ans déjà, il se présente comme un chef incontesté qui s'amuse fort à dresser l'une contre l'autre deux armées de chenapans. Quand un camp plie au nom de "Guesclin" ! Bertrand accourt à la rescousse. Si c'est l'autre, il change incontinent de parti. Batailleur, avide de horions, de tumulte et de cris, il fait l'unanimité et est adoré de tous.

    Quand survient l'heure de l'épuisement, Bertrand rassemble ses compagnons et les emmène à la taverne. Là, il félicite les vainqueurs, réconforte les vaincus, leur assurant que le sort de la guerre leur sera plus favorable le lendemain. S'il a de l'argent, c'est lui qui régale. S'il n'en a point, il demande crédit au tavernier, lui promettant de le régler sans tarder, quand bien même il devrait, pour ce faire, mettre en gage un harnap d'argent ou vendre, à Rennes, une jument de son père.

    Ses compagnons sont de simples gueux, de menus paysans, des traine-misère de village, analphabètes et lourds, condamnés dès l'enfance aux pesants travaux de la terre.

    Ceci explique sans doute que, sa vie durant, Bertrand restera attentif aux humbles et veillera à ce que justice leur soit rendue.

     Lorsque Jeanne de Malemains voit son fils revenir quotidiennement couturé de plaies, vallonné de bosses ; quand elle retrouve en guenilles ses vêtements propres du matin, elle pense, à l'évidence que les prédictions de la converse ne sont que sornettes. Jamais ne sortira quoi que ce soit de bon de cet être repoussant jailli par mégarde de ses entrailles et elle ne peut que maudire les viles inclinations qui le poussent à se colleter avec des gueux.

    Les parents de ses "adversaires" ne sont guère plus satisfaits et viennent voir Robert du Guesclin, lui dressant les comptes des horions, plaies et bosses subis par leur progéniture ainsi que le bilan de ce que coûte, chez le barbier ou le rebouteux, la réparation des dommages.


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  • Tiphaine Raguenel, fille de Robert Raguenel, seigneur de La Bellière, vicomte et homme de la première qualité, était une de ces femmes accomplies comme les héros n'en rencontrent guère, soit que Dieu ne réunisse pas sur une même famille tous ses dons précieux, soit que le mérite de l'un des époux absorbe ordinairement celui de l'autre.
       Tiphaine Raguenel, dans sa jeunesse, était surnommée par les Bretons Tiphaine la fée. Elle était savante dans la médecine et l'astrologie ; c'est elle qui dans deux combats célèbres de Bertrand lui avait pronostiqué la victoire, au grand ébahissement des Bretons inquiets ; elle qui, lorsque Bertrand se fatigua du service et voulut rentrer en ses terres, le rejeta par ses conseils et ses prédictions dans la vie glorieuse d'où il retira fortune et impérissable renommée. En effet, jusqu'à la guerre faite par Charles de Blois contre Jean de Montfort, guerre dans laquelle Bertrand fut appelé au commandement de l'armée, le héros breton n'avait eu l'occasion de déployer que les forces, l'adresse et le courage à toute épreuve du champion duelliste et du chef de partisans.
    Aussi Tiphaine Raguenel jouissait-elle auprès de son époux, et dans toute la contrée, d'une influence égale à celle d'une grande reine.
        Elle avait été belle, elle était de haut lignage. Son esprit cultivé lui donnait la supériorité sur beaucoup de prud'hommes dans les conseils, et elle avait ajouté à ces qualités précieuses le désintéressement sans exemple de son époux.

               Alexandre DUMAS "Le Bârard de Mauléon" chapitre XLVII )


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  • Alors qu’il finit de s’équiper, un écuyer vient annoncer à Bertrand Du Guesclin qu’une jeune demoiselle, âgée de 24 ans, avait prédit qu’il serait vainqueur. « Vous le verrez s’en retourner sain et sauf du combat après avoir déconfit son ennemi en champ clos, et il couchera à son aise en cette ville. Si vous ne le croyez, je veux perdre tout ce que j’ai vaillant », aurait annoncé Tiphaine Raguenel de la Bellière. Des paroles qui n’ont guère d’écho chez le futur connétable. Au contraire, il s’en offusque : « En une femme, il n’y a pas plus de sens qu’en une brebis. Laisse faire et que Dieu y ait part ! ». Bertrand Du Guesclin remporte une victoire sans appel contre Cantorbéry. Le soir, lors du banquet donné en son honneur, on lui présente la jeune astrologue et Du Guesclin, admirant sa beauté, dut regretter quelque peu ses paroles.

       Elle était belle et savante, il était laid et ignorant, cela fera un excellent mariage

        La guerre de Succession de Bretagne continue. Bertrand a-t-il oublié Tiphaine ? Il semble que non, mais il hésite à la demander en mariage. Homme de guerre, Du Guesclin est plus à l’aise dans le siège de forteresse que dans les assauts amoureux. Heureusement, Charles de Blois, dont Du Guesclin est un des meilleurs lieutenants, intervient et négocie avec la famille de Tiphaine. Le père de celle-ci, Robin Raguenel est un fidèle du parti des Penthièvre. Et il est particulièrement flatté de voir sa progéniture épouser un guerrier si réputé.
        Bertrand se sait laid. Il s’interroge : la belle jeune femme acceptera-t-elle une union avec un être aussi disgracieux que lui ? Il semble que l’obstacle ne soit pas insurmontable, comme le résume l’écrivain dinanais Roger Vercel : « Mais la rêveuse Tiphaine possède […] le regard des mages, que n’arrêtent ni les profondeurs du temps, ni l’épaisseur des chairs, et qui traverse facilement la rude et vulgaire enveloppe d’un corps d’occasion pour admirer le grand cœur qu’on lui offre. […] Tiphaine était belle et savante. Bertrand laid et ignorant : cela fera un excellent mariage. »

         Il s’évade pour son mariage

        Le mariage se prépare, mais quelques semaines avant l’événement, Charles de Blois demande à Du Guesclin d’être otage quelque temps auprès   des Anglais. Bertrand accepte à condition d’être libéré au bout d’un mois, pour se rendre à sa noce. L’échéance arrive, mais son geôlier, Guillaume Felton, refuse de le laisser partir. Alors, au cours d’une promenade à cheval, Bertrand s'échappe.

        Felton, furieux, ira par la suite poursuivre celui qu’il considère comme un parjure. Mal lui en prend, il assiège vainement Pontorson où se trouvent Tiphaine et Bertrand. La femme du futur connétable déjoue même un assaut pendant une nuit : elle a un rêve prémonitoire durant lequel elle voit des Anglais escalader le rempart. Elle se lève et donne l’alarme. Effectivement, des soldats anglais sont en train de monter sur des échelles. Ils sont repoussés. 

       Une astrologue

       Car Tiphaine Raguenel est astrologue et devineresse. Quelque temps après son mariage, qui est célébré en grande pompe à Dinan elle se charge de rédiger son horoscope à Bertrand. Elle lui dresse une liste de jours infortunés où il doit se garder de combattre. Le rude soldat en rit d’abord, mais un soir, au terme d’un rude combat au cours duquel il a été défait, Bertrand s’apercevant qu’il s’agit d’un de ces fameux jours infortunés, s’écrie : « Elle me l’avait prédit ! ».

        Peu après son mariage, Bertrand lui donne une maison au Mont-Saint-Michel. L’abbaye « au péril de la mer » est un refuge plus sûr que la ville de Pontorson dont le roi de France lui a donné la garde. Tiphaine aménage des pièces pour ses travaux d’astrologie. On dit que lorsque le roi de France demande son aide à Du Guesclin, sa femme le conforta pour rejoindre le souverain du royaume des Lys : « Sire, par vous ont été faits commencés, et par vous seulement, en nos jours, doit être la France recouvrée. » 

           Un mari absent

        Il est vrai que la jeune épousée avait du temps libre. Durant sa vie, elle ne verra guère son époux. « En l’épousant, écrit Roger Vercel, elle se voue, elle le sait, à la vie solitaire qui fut celle de tant de dames du Moyen Âge. Son mari chevauchera ; elle administrera les domaines, gouvernera les biens armera des chevaliers, les enverra rejoindre Bertrand, réunira ses rançons. »

        En 1364, Bertrand Du Guesclin est fait prisonnier lors de la guerre de Succession. Il faut payer une lourde rançon. Libéré, le roi de France lui confie la tache de réunir les grandes compagnies, des soldats sans solde qui se paient sur le pays, pour aller combattre en Espagne contre le roi de Castille Pierre Le Cruel. Pendant des années, il combat donc en Espagne. Il finit par être capturé par Le prince noir. Revenu en Bretagne, il n’y reste guère. Tiphaine le revoit quelques jours, à Caen, pour s’entendre demander de lui donner sa vaisselle et ses bagues : son mari a besoin de fonds pour aller combattre à nouveau l’Anglais…

       Bertrand Du Guesclin est d’ailleurs en Poitou lorsque, en 1372, Tiphaine Raguenel décède. Deux ans plus tard, Du Guesclin épouse Jeanne de Laval-Tinténiac. Pas plus qu'avec sa première femme, il n'aura d’enfants. Le cœur de Tiphaine a été inhumé dans la chapelle des Jacobins, à Dinan. Huit ans plus tard, celui de son illustre mari le rejoignit.

          Pour en savoir plus :

       Roger Vercel, Du Guesclin, Albin Michel, Paris, 1956  

        Arthur de la Borderie, Histoirede Bretagne, Coop Breizh, 1998


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  • BERTRAND DU GUESCLIN

    Connétable de France (La Motte-Broons, v. 1320 — Châteauneuf-de-Randon, 1380).

        D'une famille de petite noblesse bretonne, il combattit d'abord pour le comte Charles de Châtillon-Blois dans la guerre de Succession de Bretagne. Il se mit au service du roi de France après avoir été armé chevalier en 1357 et avant de devenir capitaine de Pontorson. Il vainquit Charles le Mauvais, roi de Navarre, à Cocherel (1364), devenant ainsi capitaine général du duché de Normandie et recevant du roi le comté de Longueville.

        Les exploits militaires : la Castille et les Anglais 

        Du Guesclin fut fait prisonnier par les Anglais à Auray en 1364. À cette époque, les Grandes Compagnies, appelées les Écorcheurs ou encore les Tard-Venus, qui avaient ravagé et pillé plusieurs provinces de la France, avaient établi leurs quartiers à Chagny (aujourd'hui en Côte-d'Or). Le roi Charles V, qui n'était ni assez riche pour les acheter, ni assez fort pour les exterminer, résolut de les faire entraîner hors de France et de les lancer en Espagne contre Pierre le Cruel, roi de Castille et allié des Anglais. Du Guesclin étant alors le seul homme du royaume possédant assez d'autorité pour mener à bien cette opération, on paya sa rançon aux Anglais. Libéré, du Guesclin promit aux Écorcheurs 200 000 florins de la part du roi de France, et autant de la part du pape, avec l'absolution de leurs péchés. Le nom de du Guesclin était tellement populaire que les Grandes Compagnies acceptèrent d'aller combattre en Espagne, et la Bourgogne fut ainsi débarrassée de ces pillards. Grâce à la victoire de Montiel (1369) remportée avec l'aide de du Guesclin et des Grandes Compagnies contre Pierre le Cruel, le demi-frère de ce dernier, le comte Henri de Trastamare, accéda au trône de Castille. 


        De retour en France, du Guesclin fut nommé connétable de France (1370) et réussit, en dix ans, grâce à une judicieuse tactique de harcèlement qui s'appuyait sur le réseau des places fortes solidement tenues, à chasser les Anglais de presque tout le territoire français: ils furent chassés du Poitou, poursuivis en Bretagne et contenus en Île-de-France. Du Guesclin combattit également en Guyenne (1374), assiégea Cherbourg (1378) et reçut le commandement de France.


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    Du Guesclin mourut de maladie durant le siège de Châteauneuf-de-Randon. En hommage à sa bravoure, Charles V le fit ensevelir à Saint-Denis avec les rois de France. La statue tombale exécutée à cette occasion par Thomas Privé et Robert Loisel (1397) nous permet de connaître les traits du connétable. D'autres œuvres d'art furent élevées pour abriter ses reliques: une statue tombale renferme ses entrailles dans l'église Saint-Laurent au Puy et son cœur est conservé dans l'église Saint-Sauveur à Dinan. Au XVe siècle, des tapisseries furent tissées pour relater sa carrière militaire.


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  • Quand Bertrand du Guesclin est né en 1320 près de Dinan, qui aurait pu imaginer l'incroyable destin qui sera le sien en ce Moyen-âge de la Guerre de Cent Ans ? 

       Fils ainé de Robert II du Guesclin (v. 1300-1353), petit seigneur du Moyen-âge, Bertrand Du Guesclin est un enfant mal aimé, sa laideur et sa brutalité lui valent l'inimitié paternelle. Bertrand Du Guesclin doit alors gagner le respect de la noblesse à la pointe de son épée. Très jeune, il se montre un redoutable combattant : à 15 ans, Bertrand Du Guesclin défait tous ses adversaires, avant de refuser de combattre son père. Il a 15 ans, un âge de vigueur au Moyen-âge.

        En 1357 Bertrand Du Guesclin participe vaillamment à la défense de Rennes assiégée par le duc de Lancastre. Charles de Blois l'adoube alors chevalier, le nomme capitaine de Pontorson et du mont Saint-Michel (le Mont Saint Michel est l'une des rares places-fortes du Moyen-âge à résister sans coup férir aux Anglais pendant la Guerre de cent Ans).

        En 1360, Bertrand Du Guesclin est lieutenant de Normandie, d'Anjou et du Maine. En 1364, Bertrand Du Guesclin devient capitaine général et chambellan de France : il remporte en Avril de la même année la bataille de Cocherel et reçoit le duché de Longueville en Normandie. En septembre à la bataille d'Auray, Bertrand Duguesclin combat dans le camp blésiste, Fait prisonnier en 1364, Bertrand Du Guesclin voit le roi de France paiyer sa rançon.
        En 1365 à la demande du roi de France Bertrand Du Guesclin entraîne les Grandes compagnies en Espagne, non sans avoir rançonné au passage le Pape séjournant en Avignon. Il est fait prisonnier à la bataille de Najera en 1367 et n'est libéré que contre une forte rançon, à nouveau payée par Charles V. Bertrand Du Guesclin participe à la bataille de Montiel, en 1370. En récompense de ces actions en Espagne il est fait duc de Molina.


    Charles V accueillant Bertrand Du Guesclin

       Bertrand Du Guesclin, Connétable de France

        En octobre 1370, revenu en France, Bertrand Du Guesclin est fait connétable par Charles V, avec pour d'expulser les Anglais. Contrairement aux habitudes de la chevalerie française, Bertrand Du Guesclin préfère reconquérir méthodiquement des provinces entières, assiégeant château après château. Bien souvent, le siège ne dure pas, l'issue en étant accélérée par un assaut victorieux ou plus souvent encore par une ruse.

       En 1373, Bertrand Du Guesclin participe à la campagne contre la Bretagne, avec son cousin Olivier de Mauny - chevalier banneret, notamment seigneur de Lesnen et Pair de France - alors qu'il était lui-même Breton ! Sa fidélité au Roi de France est sans failles.

       Bertrand Duguesclin en 1380 lors du siège de Châteauneuf-de-Randon d'avoir bu trop d'eau glacée après avoir combattu en plein soleil.

       Les titres de Bertrand Du Guesclin

       Les Titres acquis par Du Guesclin, petit seigneur du Moyen-âge pendant la Guerre de Cent Ans, sont :

    - Capitaine de Pontorson et du mont Saint-Michel
    - Fait par le roi de France, en 1364, duc de Longueville, en Normandie
    - Fait par le roi de France, en 1370, Connétable de France
    - Fait par le roi de France, en 1376, seigneur de Pontorson en Normandie - Fait par le roi d'Espagne roi de Grenade et duc de Molina

       Bertrand Du Guesclin est née pendant la Guerre de Cent Ans, une période du Moyen-âge propice à nécessiter ses incroyables qualités guerrières.


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        L'un des plus célèbres hommes de guerre français, la légende en a fait un chevalier exemplaire au service des faibles.
         Il est né à la Motte-Broons, près de Dinan, vers 1320. Aîné d'une famille bretonne, noble mais pauvre, le jeune Bertrand apprend très tôt à se battre, mais reçoit une éducation négligée dans le domaine des études. Il acquiert une grande réputation à disputer tous les tournois de la région dans lesquels il remporte de nombreuses victoires.
        Sa laideur, aussi remarquable que sa bravoure, lui inspire de prendre pour devise quand il sera adoubé chevalier :

    « Le courage donne ce que la beauté refuse ».

         Dans la guerre de succession de Bretagne, il prend parti pour Charles de Blois, le prétendant soutenu par le roi de France contre Jean de Montfort, soutenu par les Anglais.
        Il participe en 1342 au siège de Vannes et accompagne les fils de Charles, qui vont rejoindre leur père, gardé en otage à Londres.
        En 1352, il s'embarque au port de Blavet (Port-Louis actuel) pour l'Angleterre, où il remplace Charles de Blois fait
    prisonnier.
        Pendant un temps, on perd la trace de Du Guesclin.
        On le retrouve en 1356 devant Rennes assiégée par les troupes anglaises qui soutiennent Montfort. Ces troupes sont commandées par le duc de Lancastre. Du Guesclin pénètre dans la ville par ruse avec quelques compagnons et, malgré ses blessures, contraint finalement Lancastre à abandonner le siège. Rentré dans la ville, Charles de Blois lui offre la terre de La Roche-Rieu et l'arme chevalier de sa main. A trente-sept ans, le voilà chevalier, seigneur de la Motte Broons, et capitaine.
        Le vaillant capitaine passe ensuite au service du roi de France.
        Au service du roi Jean le Bon, il attaque et rançonne les Anglais qui s'aventurent dans la forêt de Brocéliande, en Bretagne. La guerre de Cent Ans vient de commencer. Du Guesclin mène la guerre non pas en cherchant la bataille rangée à la manière féodale, mais en harcelant l'ennemi par une guérilla incessante. Il devient vite la terreur des occupants qui le surnomment : « le Dogue noir de Brocéliande ». Les Anglais redoutent plus que jamais cet adversaire dont le nom devient célèbre dans tout le pays. Il reste le plus sûr soutien du Dauphin (futur Charles V), qui a pris la régence du royaume de France en l'absence de son père, Jean le Bon, retenu prisonnier à Londres après la défaite de Poitiers.
        Plusieurs fois fait prisonnier par les Anglais, il a dû payer rançon pour être libéré, mais il a aussi délivré Rennes, Melun, Ploërmel.
        En 1359, le Dauphin le nomme gouverneur de Pontorson, dignité qui l'élève au rang de capitaine souverain du duché de Normandie. Il reste cependant vassal du duc de Bretagne dont il est un ami personnel. Et c'est à cet ami haut placé qu'il demande d'intervenir pour réaliser son union avec Tiphaine Raguenel. Ils n’auront pas d’enfants.
    Mais, dans les semaines qui précèdent son mariage, Bertrand est donné en otage par son suzerain aux Anglais, en gage d'une nouvelle trêve. Bertrand n'accepte qu'à condition d'être libéré au bout d'un mois : il est bien décidé à ne laisser aucun impératif, royal ou pas, empiéter sur sa vie privée. Il s'échappe pour rejoindre Tiphaine qu'il épouse à Dinan en présence d'une grande partie de la noblesse de Bretagne.
        En tant que capitaine du duché de Normandie, il fait respecter les accords du traité de Brétigny en Normandie et en Bretagne, traité qui met fin à la première partie de la guerre de Cent Ans et consacre la victoire de l'Angleterre.
    En 1364, Charles V, couronné à Reims, lui remet le titre de chambellan du roi et le charge de défendre la Normandie contre Charles de Navarre, dit "le Mauvais", allié aux Anglais. Il le vainc à la bataille de Cocherel.
        La même année, la guerre de succession de Bretagne reprend, et du Guesclin s'engage au côté de Charles de Blois à la bataille d'Auray. Le duc est tué et Du Guesclin fait prisonnier par Jean Chandos, le capitaine anglais.
        Charles V paie sa rançon, et le charge, en 1365, de conduire en Espagne les Grandes Compagnies qui ravagent la France. En Espagne, le capitaine breton soutient Henri de Trastamare contre Pierre le Cruel, parvient à le faire reconnaître roi de Castille. Ce dernier le comble d'honneurs. Mais Pierre le Cruel, réfugié à Bordeaux, obtient l'alliance du Prince Noir et une armée commandée par Chandos.
        Et c'est la bataille de Navarette en 1367, déconseillée par Du Guesclin. Il est fait prisonnier par le prince de Galles (le Prince noir). De nouveau libéré contre rançon, il reprend la lutte aux côtés de don Henri de Trastamare et remporte la victoire de Montiel en 1369, qui assure le trône à son protégé. La guerre contre les Anglais reprend en France la même année. 

    Du Guesclin reçoit l'épée de Connétable de la main du roi
        Nommé connétable en 1370, Du Guesclin mène les opérations pendant près de dix ans. Connaissant la supériorité numérique de l'adversaire, il préfère la guerre de harcèlement aux grandes batailles coûteuses en hommes. Il chasse les Anglais de Normandie, combat en Guyenne, dans le Poitou, en Saintonge, puis en Bretagne et en Normandie. La fin de sa vie est assombrie par la décision de Charles V, qui confisque la Bretagne en 1378 : déchiré, messire Bertrand refuse de combattre les Bretons et se retire à Pontorson. Il réapparaît en 1380, se dirige vers l'Auvergne pour y combattre les Routiers. Le 9 juillet, il met le siège devant Châteauneuf-de-Randon, tombe malade peu après, et meurt le 13 juillet.
        Le gouverneur de la ville, qui avait dit qu'il ne se rendrait qu'à lui, dépose quelques jours plus tard les clefs de la cité sur son cercueil.
        A sa mort, les Anglais ne possédaient plus que quelques territoires en Aquitaine et dans le Nord.

        Avant sa mort Du Guesclin avait demandé à être enterré en Bretagne près de Dinan. Mais le roi Charles V exprima la volonté de l'enterrer à Saint-Denis, tout près de la sépulture qu'il s'était fait bâtir. Rapatrier sa dépouille d'Auvergne jusqu'à Paris en plein été posait le problème de conservation du corps. Ses entrailles furent laissées au Puy-en-Velay, en l’église Saint-Laurent actuelle. Une autre partie fut enterrée à Montferrand dans une petite église qui s'appelait les Cordeliers, détruite en 1793 par les révolutionnaires. Arrivé au Mans le convoi fut intercepté par un envoyé du roi qui réclama la dépouille pour la transférer à Saint-Denis. Le squelette lui fut alors remis et seul le cœur arriva à Dinan. Ainsi prend fin l’histoire de Du Guesclin, il a trois tombeaux, deux gisants dont l’un le représente avec la barbe au Puy-en-Velay (instantané de l’époque), et l’autre sans barbe à la basilique Saint-Denis près de Paris.

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